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 [Commentaire] Capitulaire aux Saxons (785)

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glorendhel
Maitre de Guilde
glorendhel
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   Posté le 04-11-2004 à 09:42:19   Voir le profil de glorendhel (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à glorendhel   

Capitulaire de Charlemagne aux Saxons (785)

Par F. S






Introduction

Ce document est constitué d’un acte officiel du roi à valeur législative intitulé « De partibus Saxoniae ». Ce capitulaire est divisé en Capitulum, sorte de sous division, dont chacune aborde un point précis. Il constitue le droit territorial des populations saxonnes contre lesquelles Charlemagne menait campagne.
Ecrit en Latin, ce capitulaire est né de l’initiative de Charlemagne (742-814). Après consultation de ses conciliarii, il le soumit au Placitum Generale (plaid général) constitué de clercs et de laïcs. Puisque le « De Partibus Saxoniae »concernait d’avantage le dogme, les questions étaient posées d’avantage aux clercs qu’aux laïcs. Les avis et conseils apporté par le plaid étaient alors formulés chapitre par chapitre (capitulum) et soumis ensuite à une approbation par acclamation des contingents guerriers rassemblés pour la campagne prévue. Ne restait plus à Charlemagne d’officialiser le capitulaire et de ce fait de le faire entre dans le droit franc.
Ce capitulaire nous est parvenu grâces aux travaux de Louis le Débonnaire, un abbé de Fontennelle, ancien conseillé de charlemagne et mort en 833-834.
En effet à l’époque mérovingienne on n’avait pas éprouvé le besoin de regrouper les capitulaires, après Charlemagne cela devint une nécessité. Ainsi Louis le Débonnaire établit 1 recueil divisé en quatre livres. Le 1er et dont est issus notre document comptait 162 capitulaires relatifs aux affaires religieuses. (2ème=48 religieux ; 3ème 91 affaires temporelles le 4ème capitulaire de Louis IV). Le travail de Louis le Débonnaire fut ensuite complété par celui de Benoît le Lévite diacre de Mayence).
Le destinataire de capitulaire est double. D’une part il s’adresse aux envoyés du roi chargés de son application et d’autre part à la population saxonne.
Ce capitulaire est du plaid qui réunissait en principe tout hommes libres du royaume venus en armes. Dans les faits le plaid réunissait les grands du royaumes : évêques, abbés, comtes, vassaux du roi et maire du palais. En ce qui concerne ce capitulaire, il fut d’avantage dicté par Charlemagne (781 : Reçoit autonomie Aquitaine prévu comme Royaume pour son fils Louis).
A la date de ce texte, cela fait treize année que l’armée franque et Charlemagne tente la « dilatatio regni » en Saxe accompagnée d’un « dilatatio christianitatis » visant à convertir au christianisme le peuple saxon païen. Celui si résiste à toute évangélisation alors que la Frise, la Hesse et Thuringe sont convertis depuis le passage de Winfrith dit St Boniface (672-754). La Saxe quand à elle continue à pratiquer le culte des arbres, des rochers, et des sources, (chap. 21). Leur Dieu est un arbre géant appelé Irminsul que Charles fait abattre en 772. En 777, est réuni une assemblée de pacification à Paderborn. En 778 Widukind chef Saxon mène une révolte qui conduira les troupes saxonnes au pillage de l’abbaye bénédictine de Fulda fondée par St Boniface (672-754). En 782 l’armée franque est massacrée, c’est le désastre de libre Charlemagne riposte par la décapitation de 4500 otages à Verden. En 785 il prend alors des mesures sévères dans son capitulaire « De Partibus Saxoniae » sui énonce les délits possibles uniformément punis de mort.
Charles se sentait investie d’une mission, celle de combattre l’hérésie et les infidèles en leur défendant les péchés. Il se voyait responsable de leur Salut éternel. Prêchant le Pater Noster, il imposait un gouvernement qui s’appliquait à tout homme, embrasant la société entière dans une optique de construction de la Cité de Dieu.
Il est intéressant de voir de quelle manière le « De Partibus Saxoniae » recouvre cette volonté d’évangélisation au sein du royaume et de quelle manière elle est programmée.


I. Le processus d’évangélisation

L’expansion du royaume franc, la dilatatio regni s’est accompagné d’une dilatation christianitatis visant à convertir les peuples conquis.


A. La favorisation du christianisme

C’est pourquoi dans une volonté de former le populus christianus, prend les mesures nécessaires à l’établissement du culte chrétien en Saxe. Comme on le note au chapitre 1 les églises sont « d’avantage honorées » par rapport au « temple des idoles ». Cette distinction va de paire avec les missions de conversion de l’évêque St Boniface qui convertissait les populations germaines en faisant valoir la splendeur du culte. Charlemagne pour passer le message divin construits églises et chapelles qui par leur vitraux, leur reliquaire sont autant de merveilles pour les yeux que de substituts aux idoles.
Dans le même temps il demande au chapitre 22 « que les corps des saxons chrétiens soient portés aux cimetières des églises ». Lorsqu’on sait que Charlemagne pratiquait la conversion forcée sans distinction morale auprès des saxons, par cette disposition il obligeait les familles des défunts à venir près des églises, terres sacrés chrétiennes leur faisant quitter peu à peu les terre sacré païenne où reposaient les ancêtres dans des « tumulus ». Le tumulus est une construction aux formes variées obtenue par amoncellement de pierre de dimensions diverses. Ces pierres étaient liées entre-elle par un ciment argilo sableux. Généralement les tumulus contenaient plusieurs membres d’une même famille.
Au chapitre 2 Charlemagne tout comme St Boniface en appel à « l’honneur de Dieu » qui accorde son pardon au pécheur. Ainsi de cette manière il montre l’aspect du Dieu chrétien bon et miséricordieux ce qui contraste avec le dieu guerrier Irminsul, ou le dieu vengeur Hermann-Arminius.

Alors que dans un premier temps le capitulaire prend les mesures nécessaire à l’établissement du culte chrétien en Saxe, il énonce dans en parallèle des chapitres qui ont pour objectif de sanctionner le paganisme.


B. Le paganisme sanctionné

La disposition du chapitre 7 au sujet de la crémation des défunts semble en contradiction avec le chapitre 22 que nous avons déjà abordé. En effet l’allusion à une crémation insérée dans les rites funéraire ne coïncide pas avec les fouilles archéologiques faites dans les tumulus. La pratique de la crémation est bien antérieur à Charlemagne, et avec l’influence du monde romain celle si est abandonnée à partir du IVe siècle. En effet pratique du Néolithique l’arrivée des romains s’accompagne des 1ere nécropoles, où les corps étaient enterrés dans des sarcophages pour les plus riches, des cercueils en bois pour les plus pauvres. Les seules crémations pouvant encore être enregistrées étaient celle des Chefs qui placés dans le drakkar avec leurs effets personnels pouvant ainsi accomplir leur voyage vers l’autre monde. Cependant les découvertes archéologiques ont prouvée que le drakkar n’était pas systématiquement brûlé.
Par ailleurs les dispositions du chapitre 9 nous interpellent également. En effet diable et démons cités n’entrent pas dans le panthéon saxon. Dans l’imaginaire chrétien, le Diable était parfois représenté en dragon ou en serpent. C’est sous cette dernière forme qu’il peut être rapproché du serpent Jorgmungad annonciateur de la fin du monde. Cependant Jorgmungad n’était pas une divinité populaire, et les récits mythologiques en firent même un banni.
Par ailleurs les sacrifices humains n’étaient pas coutume en Saxe. Ils étaient pratiqués au néolithique comme on pu l’observer dans le massif Vosgien sur le site des « pierre à sacrifice ». Cependant au VIIIème siècle de telles pratiques n’avaient plus lieux.
En revanche le chapitre 21, répond d’avantage aux pratiques Païenne. En effet faire « Vœu aux sources » est interdit. Le culte des sources est à rattacher à plusieurs croyances. Comme par exemple aux Dieu Mimir gardien de la source de Sagesse, qui confiait à celui qui buvait de son eau « des secret que tout le monde ignorait ». Par ailleurs les sources étaient lieux de vie de nombreuses entités mythologiques tel que nymphe, fée et autres petits êtres. Ainsi en interdisant le vœu au sources, charlemagne évinçait bon nombre de divinités païennes.
Le chapitre 21 sanctionne également le vœu aux forêts et aux arbres. A ce sujet la bible est sans ambiguïté. Ainsi dans le Deutéronome est il dicté par Dieux : « Vous démolirez leurs autels, briserez leur stèle, couperez leurs pieux sacré et brûlerez leurs idoles. Ainsi lorsqu’en 772 Charlemagne fait abattre l'Irminsul, l’arbre de vie il ne fait que suivre la parole de Dieu, tout en supprimant la demeure du Dieu païen. Cependant il ignorait que cela ne résoudrait pas le problème puisque pour les saxons, les Dieux vivent dans la forêt, formant le Leshi c'est-à-dire l’esprit de la forêt. C’est pourquoi en 785 Charlemagne rectifie le tir et interdit le culte des arbres et des forêts dans sa globalité.

Charlemagne, comme nous l’avons dit ce fait le protecteur de la cité de Dieu. Il lui est donc nécessaire d’encadrer au mieux ses fidèles afin de garantir leur Salut.


II. L’encadrement des fidèles.


Se faisant épée temporelle protectrice du spirituel, charlemagn prend des dispositions qui concerne autant le populus christianus, que la terre sacré du royaume (puis plus tard de l’Empire). C’est pourquoi son capitualire prévoit des dispositions qui assurent un minimum le Salut des fidèles tout en les faisant participer à la vie de l’Eglise.


A. La protection des chrétiens


Le processus d’évangélisation s’est fait en partie par l’envoie d’ecclésiastiques chargés de la prédication en terre saxonne. C’est pourquoi lorsqu’on voit le sort qui fut fait à St Boniface alors qu’il était germain, il devenait nécessaire de les protéger. Ainsi au chapitre 5 l’assassinat d’ « un évêques, un prêtre ou un diacre » qui constituent les ordres majeurs de l’Eglise Catholique est puni de mort.
On remarque également au chapitre 10 que « conspirer avec les païen » contre les chrétiens est puni de mort. Ce chapitre à un double objectif:
D’une part il assure la protection des envoyés du roi chargés de l’application du capitulaire alors en missions en Saxe. Ce sont les missi dominici.
D’autre part en 785 Charlemagne n’a toujours pas fait la réforme sur cette fonction. Les missi envoyés sont ceux créent par Pépin le Bref. Ces agents politiques étaient pour la plus part des inspecteurs domestiques. Leur humble origine et leur faible fortune les rendaient facilement corruptible. Ainsi si un missi acceptait d’un corrompu par un Saxon il risquait la mort. Par ailleurs la deuxième disposition du chapitre 10 freinait encore plus les tentations de ces envoyés. En effet les missi ne partaient pas seul. Une escorte l’accompagnait, autant pour sa sécurité que pour les affaires politiques dont il était en charge. Ainsi les personnes qui l’accompagnait risquaient elles aussi la mort si le missi se laissait corrompre. Par le chapitre 10 Charlemagne s’assurait la fidélité de ses envoyés grâce à une auto surveillance de la mission.
L’envoyé du roi est également protégé des Saxons par le chapitre 11. En effet avant son départ il était chargé de pouvoirs royaux, personnifiant le Roi. Attenter à la vie d’un envoyé s’était attenter à la vie du roi et également passible de mort.


B. Les préceptes chrétiens

Le capitulaire prend également des mesures qui réglementent la pratique de foi chrétienne en Saxe.
Comme l’énonce Charlemagne au chapitre 16 il agit sous les « auspices de Jésus Christ ». Il convient donc de respecter le jeûne que celui-ci fit et de suivre le Carême. Ainsi au chapitre 4 on peut constater que « violer le saint jeûne de Carême » est passible de mort. En effet le dogme chrétien prévoit que pendant ce jeune aucune graisse ou viande ne doit être consommée. A l’issu du jeûne, le fidèle purifié est alors apte à recevoir le corps du christ consacré adjoint de son Pardon. C’est ce que l’on appelle la communion. Si celle si est imposée au clercs, elle reste rare chez les laïcs saxons restant souvent limité aux trois grande fêtes de l’année : Pâques qui clôture le Carême, Noël et la Pentecôte. La 2nde disposition du chapitre adoucis la sanction en cas de violation
Par ailleurs élément fondamental de la pratique chrétienne, le sacrement du baptême est obligatoire et ne peut être évité sous peine de mort. En effet ce sacrement est le 1er de la vie d’un chrétien le faisant entre dans le populus christianus. Sa fonction est double sous Charlemagne. D’une part il permet au baptisé d’être enterré en terre chrétienne et donc assurer son Salut s’il venait à mourir. D’autre part puisque Charlemagne était le protecteur de la Cité de Dieu qui englobe tout les chrétiens, il soumettait ainsi les saxons baptisés à son autorité.


C. Les obligations du chrétiens


Alors que dans un 1er temps, le capitulaire veille au suivi des fidèles dans leurs pratiques religieuses, au travers de chapitres principaux (cf. chap1) discutés au sein du plaid par les clercs. Dans un second temps des chapitres secondaires (cf. chap15) furent adopté afin d’assurer l a participation des chrétiens saxons aux dépenses des églises locales. Comme il est écrit, ces chapitres furent « consentis par tous » c'est-à-dire accepté par les laïcs et les clercs siégeant au plaid.
Ainsi a-t-il été décidé que les habitants du territoire cèdent 1 curtis et deux manses par église. La curtis est un domaine foncier (appelé aussi Villa) généralement divisé en deux : la réserve et la manse (qui peut être ingénule en appartenant à des colons, servile pour des esclaves, ou lidile pour les affranchis et demi libre descendant de lète). Cette donation forcée devait être faite à chaque église c'est-à-dire à chaque découpage territorial qui avaient été fait en saxe autour des institutions de prédication et qui pouvait alors subvenir à leurs revenus. Par ailleurs afin d’exploiter ces terres le chapitre 15 prévoit aussi que soit fourni un serf et une servante.
D’autre part au chapitre 16 il est convenu à ce que le fisc verse un dixième des cens qu’il perçoit aux églises. A l’époque carolingienne le mot fisc désigne la terre appartenant au souverain et donc jouissant du privilège d’immunité. Ainsi le roi remplissant son rôle de protecteur assurait une part des dépenses des conversions.
Enfin le chapitre 17, laisse apparaître les 1ers prélèvements de la dîme, c'est-à-dire la dixième partie de la fortune et du travail. Encore sous la forme de donation il s’agit d’une contribution nouvelle des fidèles à l’Eglise, leur permettant d’assurer ainsi le service public pour le culte et l’entretient des pauvres.


CONCLUSION


Ainsi pour conclure sur ce document nous pouvons rappeler que ce capitualire accompagnait les campagnes militaires et complétait de manière très répressive l’évangélisation menée par Charlemagne. Il concernait un peuple aux pratiques païennes qui s’était dés le début des conquêtes carolingienne montré réfractaire à une conversion.
On montrera du doigt cependant la méconnaissance des coutumes païennes par Charlemagne, sachant qu’en même temps à la date de 785 Charlemagne était au Sud Ouest de la France occupant progressivement les places de sécurités de Catalogne et de Navarre. On notera également le caractère répressif et d’intimidation de ce texte. Le message est clair : « convertissez vous où c’est la mort ». L’objectif de ce capitulaire semble avoir été rempli puisque la même année, Widukind chef saxons qui jusqu'à présent menait la révolte, se converti et reçoit le baptême à Attigny.
Ce n’est qu’en 797, qu’un second capitulaire met fin à la terreur et aux exécutions prévu par celui de 785, alors que dans le même temps la Saxe se dote en évêchés comme à Brême, Paderborn, Verden et Minden.
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